Chronique – 35


Des rizières Viennoises, de l’embouchure du Danube, des moutons et des humains

Aujourd’hui nous sommes allés dans la périphérie de Vienne pour rechercher les moutons nous permettant d’atteindre Bangkok par les sommets des montagnes avoisinantes le mode de transport étant le saute-mouton intégré.

Notre pérégrination a été quelque peu insolite, surprenante et à vrai dire déroutante. Je pensais que Vienne au printemps serait proche des paysages à la Hodler mais pas le moins du monde, pas de sommets encore enneigés, de cascades enflées, de chalets coquets, rien que des rizières, des temples, des buffles, des petites maisonnettes aux toits de tôles colorés et comble d’étonnement l’embouchure du Danube et la mer à quelques kilomètres à peine de Vienne.

Il peut s’agir à mon sens (i) d’un changement quantique de grande ampleur, (ii) d’un saut dans l’une des dimensions parallèles ou (iii) de la réalisation virtuelle d’un réseau militaro-industriel très puissant apte à changer les décors au gré des envies de ses promoteurs masqués.

Nous ne nous sommes pas laissés prendre par cette altération du temps ou de l’espace et sommes restés sur une acceptation Newtonienne teintée d’Einstein et Poincaré des choses et avons progressé en nous focalisant sur un seul et même but, trouver des moutons nous permettant de mettre en place notre nouveau système de déplacement.

Cependant, force a été de constater que les autrichiens que nous avons rencontrés n’ont pas été très coopératifs et ne nous ont pas indiqué surement et directement la direction des élevages d’ovins. On nous a mis en relation avec des buffles, voire des éléphants ou des tigres, allez savoir ce qui se cachait derrière cette intention fallacieuse, mais pas de mouton. Rien, même pas un petit agneau et encore moins un bélier, rien de tout cela, nenni.

Notre quête est restée totalement infructueuse.

Après plusieurs heures de marches, nous nous sommes arrêtés dans un village de pêcheurs sur pilotis et tout en contemplant les paysages maritimes autrichiens avons devisé sur la meilleure manière de trouver des moutons en terrain hostile.

L’extincteur, esprit pratique par excellence, a suggéré de chercher des laiteries ou petits restaurants d’altitude, trouver du fromage de brebis artisanal et remonter la filière à partir de ce point précis.

Le Yéti était prêt à escalader les montagnes pour l’aider mais comme il n’y avait pas de montagnes environnantes et encore moins de laiteries nous sommes restés chou-blanc, les pingouins s’étant déclarés disposés à cet égard à vendre ce légume au marché fluvial mais nous les en avons dissuadés pour pouvoir demeurer compact et cohérent dans notre approche.

Le grille-pain moins dépressif que d’habitude a suggéré d’appliquer le principe Kierkegaardien d’ironie à cette situation et a proposé de réunir des humains en lieu et place des moutons puisque selon lui le mammifère le plus proche de du mouton de par son comportement était assurément le bipède soi-disant humain.

Le Yéti a surenchéri en soulignant que l’humain avalait tout et n’importe quoi, les armes de destruction massive, les crises financières, les spéculations et les enrichissements sans foi ni loi, ce qui drainait son système lymphatique et hépatique sans pour autant ralentir la courbe de son vieillissement selon les dernières données disponibles ce qui le rapprochait alors du cochon tout autant que du mouton. Il s’est cependant rallié à la cause du grille-pain et a proposé de réunir des humains quelconques en leur faisant miroiter quelque chose, la présence de Madonna à Vienne, la réunification de l’Autriche et de la Hongrie, le couronnement d’un Bourbon, la décapitation du Père-Noël, la victoire du Rapid de Vienne et d’Ailleurs en coupe d’Europe des clubs pas champions pour un sou, ou quoi que ce soit de similaire et de fondamentalement important dont le dévoilement aux foules moutonnesques permettrait de rallier à notre cause des centaines d’humains pantelants, chancelants et totalement niaiseux.

J’ai profité de ce comportement un brin disgracieux à l’égard de Maria et moi-même pour reprendre l’avantage sur le grille-pain, l’enlever des mains de Maria et le poser dans celles du Yéti en suggérant qu’ainsi il ne serait plus dans des pattes ovines ce qui l’a visiblement chagriné au plus haut point entrainant un déluge de larmes conséquent. J’ai néanmoins ajouté que si l’humain contemporain était tel c’était aussi parce que l’histoire, la philosophie, la géographie, ou les langues mortes n’étaient plus vraiment enseignées à l’école ce qui expliquait le manque de recul et de concentration de la gente humaine mais ceci a laissé toute le monde froid, surtout le réfrigérateur qui a indiqué qu’il avait déjà accueilli un humain en son sein – moi – et qu’il pouvait se charger d’un ou plusieurs autres à notre convenance.

L’autruche volante s’est dressée et a scandé un poème de sa composition l’humain d’un saut de puce est devenu géant puis grenouille avant de finir mouton et bientôt mariné en ris de veau, de dérision en ironie et de grandeur en décadence, celui par qui le ciel s’est terni s’est vu à son tour arraché les couleurs et remplacé les gilets de sauvetage par des tricots en laine de mouton…

Je n’ai pas écouté la suite.

Les pingouins ont proposé de sélectionner les candidats humains en imposant un questionnaire sur Piero della Francesca mais nous avons écarté cette hypothèse depuis que nous avons compris ce qu’il advenait des candidats malheureux à cette épreuve – voire chronique précédente (NDLR ceci est encore une nouvelle preuve de l’incapacité de l’auteur de comprendre qu’en vertu de la loi 345/tz/cht du neuviose 3 la publicité clandestine est interdite dans cette chronique. Bon sang ! Quand donc comprendra-t-il ?).

Maria a simplement proposé de quérir quelques humains aux alentours et de leur proposer un jeu de saute-moutons. Nous nous sommes tous perdus dans son regard et avons opiné du chef sans réaliser ce qu’elle nous disait. Cependant, par prudence, j’ai suggéré au dernier moment que ce soit moi qui le fasse plutôt qu’elle, on ne sait jamais. Tout le monde a agréé.

Nous sommes ainsi repartis à la recherche des moutons perdus et réincarnés en humains de la dernière génération.
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